Les 3 grands pouvoirs de l’état
Le principe de la séparation des pouvoirs, préconise que chacune des trois grandes fonctions de l’Etat, à savoir le législatif, l’exécutif et le judiciaire, soit exercée par un organe distinct ou une instance différente et indépendante. Chaque pouvoir étatique a une fonction bien définie :
Le pouvoir législatif édicte les lois.
Il est exercé par le Parlement, lequel jusqu’ici, a été monopolisé par le Parti de l’ancien président Ben Ali, à savoir, le Rassemblement Constitutionnel
Démocratique (RCD). Le Parlement étant constitué de la Chambre des Députés élue au suffrage universel direct et de la Chambre des Conseillers élue par les membres de la Chambre des Députés et par les conseillers municipaux.
Le pouvoir exécutif exécute les lois.
Le pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République assisté par un gouvernement dirigé par un Premier Ministre. Le Président de la République, en vertu de l’article 53 (nouveau) de la Constitution,
veille à l’exécution des lois et exerce le pouvoir réglementaire général.
Quant au gouvernement, il veille à la mise en oeuvre de la politique générale de l’Etat, conformément aux orientations et aux options définies par le Président de la République.
Le pouvoir judiciaire contrôle leur application.
Afin de garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire, l’article 65 proclame
solennellement «l’autorité judiciaire est indépendante; les magistrats ne sont soumis dans l’exercice de leurs fonctions qu’à l’autorité de la loi».
De même, l’article 67 de l’actuelle Constitution confie au «Conseil Supérieur de la Magistrature, le respect des garanties accordées aux magistrats en matière de nomination, d’avancement, de mutation et de discipline».
La constitution
Qu’est ce qu’une constitution ?
La constitution est la chose la plus importante qui fonde une Nation, comme son nom l’indique, elle constitue l’essence de ce qu’est une Nation. C’est à partir de ce texte, que toutes les lois d’une Nation, sont pensées et rédigées. C’est le texte fondamental à partir duquel, une Nation construit et ordonne son État. C’est en même temps, la forme que prendra l’État, et l’esprit avec lequel on rédigera ses lois. La constitution est le texte qui agence les principes fondateurs de l’État, dont se dote une Nation. Cela signifie que, lorsqu’une Nation (qui est la matérialisation géographique d’un peuple) décide de construire un État capable d’organiser la vie collective et la chose publique, elle doit penser une constitution. C’est dans ce texte que les institutions sont pensées. Ce texte doit être compris par tous, comme reflétant la volonté générale et comme le contrat social qui lie l’ensemble des individus en tant que peuple. C’est un texte qui devient, dès qu’il est accepté, juridique, parce que l’ensemble des lois qui régissent un État, doivent lui être subordonnées. Mais, il est très important de comprendre, que sa rédaction ne nécessite pas forcément de compétence juridique. Une constitution n’est pas écrite par des juristes, mais par les représentants du peuple. L’essentiel d’une constitution, n’est effectivement pas, qu’elle soit juridique, mais, qu’elle pose les fondations, à partir desquelles, le droit pourra commencer. Autrement dit, le fondement d’une constitution n’est pas le droit, mais les principes
desquels découle le droit. La constitution sera donc, le texte qui déterminera quels seront les principes qui fonderont l’État, dont notre Nation va décider de se doter.
Constitution : Objectif ?
Une constitution est la loi fondamentale d’un Etat qui définit, les droits et les
libertés des citoyens, ainsi que, l’organisation et la séparation des pouvoirs politiques (législatif, exécutif, judiciaire). Elle précise, l’articulation et le fonctionnement des différentes institutions qui composent l’Etat (Conseil Constitutionnel, Parlement, Gouvernement, Administration…).
La constitution se situe au sommet du système juridique de l’Etat dont elle est le principe suprême. L’ensemble des lois, décrets, arrêtés et traités internationaux, doivent être conformes aux règles qu’elle définit. Elle peut prendre la forme d’un texte unique ou d’un ensemble de lois. Une constitution est en général, élaborée par une assemblée constituante (pouvoir constituant originaire) réunie spécialement pour cet objectif.
Une Constitution est rigide, lorsque la procédure prévue pour sa révision, est peu aisée à mettre en oeuvre.
Qu’est-ce qu’une Assemblée Constituante ?
Une Assemblée Constituante est une assemblée élue par le peuple, selon certaines modalités, afin de rédiger une Constitution. Le mandat de ses membres, appelés les députés constituants, doit s’arrêter à la rédaction de cette constitution et à sa promulgation.
Comment se déroule la rédaction de la Constitution par l’Assemblée
Constituante ?
Une Assemblée Constituante, parce qu’elle est constituée des représentants du peuple élus par le peuple, est forcément divisée à certains moments et sur certains points. C’est pourquoi, son fonctionnement relève de l’argumentation et du débat et c’est pourquoi, il est nécessaire que soit représenté en son sein, l’ensemble des courants qui constituent le peuple de la Nation qui l’élit. Si cette représentativité venait à faire défaut, la Constitution qui sortirait de cette Assemblée Constituante ne pourrait faire l’unanimité et alors, la dissension reviendrait dans la Nation et l’État serait incapable de fonctionner.
Concrètement, les députés devront se réunir régulièrement et leur séance de travail sera décomposée en plusieurs temps.
Dans un premier temps, les députés feront les propositions d’articles qui leurs
semblent les plus évidentes et les plus nécessaires. Ces propositions d’articles seront compilées, analysées, puis, il sera procédé à un débat et à un vote pour chacune d’entres elles.
Dans le débat devront s’opposer les arguments des défenseurs de la proposition et les contre -arguments des détracteurs de cette proposition d’article. Il est évident que, les propositions qui reflètent des courants trop radicaux, trop spécifiques, trop corporatistes, seront éloignées par la majorité rapidement. Ne resteront, que les propositions qui auront fait l’unanimité.
Ensuite, ces propositions qui auront fait l’unanimité, seront compilées, puis devront être mises en ordre. Cette étape, sera une étape de réflexion collective qui aura pour but de produire l’esprit de la Constitution. Car la place des articles, déterminera leur importance et partant, l’inclination que les députés constituants donneront à la Constitution, et partant, à l’État.
La procédure sera la même que précédemment, à savoir, les députés feront leurs propositions, les défendront et les attaqueront, puis, il y aura un vote, afin de déterminer quelle proposition l’emportera sur les autres.
L’Assemblée constituante : mode d’emploi
La première partie du combat pour notre liberté, est finie, et nous pouvons
maintenant, affirmer que nous l’avons gagnée. Le temps historique l’a emporté sur le temps économique. Certes, il y a encore beaucoup de résidus de l’ancien régime qui subsistent, mais ils sont à découvert, seuls, et face à dix millions d’ennemis.
Laissons donc, le temps faire et soyons sûrs que la mémoire et l’honneur du peuple tunisien ne leur laisseront pas de répit. Ils finiront par disparaître dans la honte, la solitude et le mépris de tous.
Maintenant, commence une autre partie de cette guerre pour la liberté. Cette partie va être, comme la précédente, longue, compliquée et dure à mener. Mais n’ayons pas peur, le peuple tunisien saura vaincre et arracher sa liberté de haute lutte, parce que son destin le veut.
Notre nouveau champ de bataille est la Constitution. Cette bataille s’organisera autours de l’Assemblée Constituante et le premier objectif à sécuriser, est le Code Electoral. Ces choses là ne sont pas vraiment claires pour tous et la première des choses à faire, est d’expliquer et de clarifier chacun de ces points.
Le vote
Qui peut voter ?
Tout tunisien et toute tunisienne âgé(e) de plus de dix huit (18) ans accomplis et ayant la nationalité tunisienne depuis au moins 5 ans, jouissant de tous leurs droits civils et politiques et n’étant dans aucun cas d’incapacité prévue par la loi.
Qu’est ce que le Code électoral ?
Le Code Electoral est la manière dont va être mise en place une élection. Cette expression recoupe en même temps :
‣ Le type de suffrage, c'est-à-dire, les conditions qui seront requises pour avoir le droit de voter. Étant donné que la Tunisie a théoriquement le suffrage universel, le seul point de détail important à régler, sera, l’âge minimum requis pour voter.
‣ Les conditions d’éligibilité, c'est-à-dire, les conditions requises pour qu’un citoyen puisse se présenter aux élections. Il est évident qu’en ce qui concerne les élections à une Assemblée Constituante, ces conditions doivent être le moins exigeantes possible, puisque cette Assemblée, doit être la plus représentative du peuple. Plus il y aura de limites, moins l’Assemblée sera légitime. La question de l’âge y sera particulièrement importante, puisque la jeunesse doit y être représentée.
‣ Le mode de scrutin, c’est à dire la manière dont les votes attribueront les sièges à l’assemblée. Ce terme regroupe aussi, la manière dont les candidats doivent se présenter, en leur nom propre (scrutin nominal) ; ou en se regroupant autours d’idées communes ou de programmes (scrutin de liste).
Il y en a de plusieurs types et le choix du mode de scrutin, est extrêmement
déterminant. On pourrait dire, que c’est presque par ce seul point que l’on pourra avoir un système de représentation démocratique ou pas.
Pour esquisser le problème qui fera l’objet d’un article à part entière, il faut dire qu’il y à deux grands types de modes de scrutin :
‣ Le scrutin proportionnel, c'est-à-dire, un scrutin qui permet à tous les candidats, d’avoir des sièges proportionnellement à leur résultat. Par exemple, si une liste obtient 30% des voix, elle obtiendra 30% des sièges à l’Assemblée. Ce mode de scrutin, a l’avantage de permettre une véritable représentation du peuple, car tous ceux qui ont obtenu des voix en nombre suffisant, obtiennent un siège dans l’assemblée en proportion.
‣ Le scrutin majoritaire, c'est-à-dire, un scrutin où celui qui obtient le plus grand
score obtient le siège. Ce scrutin permet si peu la représentation, qu’il ne mérite pas lus que d’être évoqué. Ceux qui perdent, n’auront pas de représentants élus, or pour une Assemblée qui se doit d’être le plus représentative possible, ce scrutin est bien évidemment malvenu.
‣ Le tirage au sort parmi les candidats. Même si ce mode de scrutin est le plus démocratique d’entre tous, il ne semble pas valable pour l’élection d’une assemblée constituante, pour les mêmes raisons qu’énoncées précédemment pour le scrutin majoritaire.
‣ Les modalités de vote, c'est-à-dire, la manière dont les électeurs pourront voter. Faudra-t-il être inscrit sur des listes électorales ? Sera-t-il possible de voter avec sa carte d’identité par voie électronique ? Cette question est très importante en ce qui concerne la possibilité pour tous de voter et pour le contrôle de la légalité des élections.
‣ Le découpage du territoire national en circonscriptions, c'est-à-dire, le nombre de Députés à élire en fonction du nombre d’habitants et la manière dont les zones d’habitation sont découpées. Cette question est vitale en ce qui concerne la répartition et la représentativité des régions et des tunisiens dans leur ensemble, et elle occupe tout particulièrement les tunisiens résidants à l’étranger.
Ainsi s’achève cette première esquisse, de ce que sont ces choses, qui doivent devenir pour nous tous, l’une des préoccupations majeures de ces prochains mois.
Avant de terminer, il convient d’insister sur le fait qu’une assemblée constituante, n’est pas le lieu de la dissension, mais le lieu de la réunion. Ce n’est pas une arène politique, mais le lieu d’où toutes les forces politiques de la nation, devront s’entendre pour écrire les fondations de l’espace publique. Il faut insister sur le fait que, la question des partis est complètement déplacée dans cette assemblée. Effectivement, les personnes voulant devenir des députés constituants, c’est à dire les représentants du peuple tunisien, qui vont avoir la responsabilité, devant l’avenir de notre Nation, d’écrire le texte qui servira de base à tout le reste, doivent se réunir, non pas par parti, mais par affinité de pensée et de représentation d’intérêt. Toute autre façon de faire n’entraînera que des complications et amènera des problèmes insolubles dans ce qui sera le coeur et l’âme de notre avenir. Et il ne s’agit pas ici d’avoir une expérience dans la gestion de l’État, mais d’avoir des idées sur ce que doit être notre nation. C’est sur ces seules idées que nous devrons choisir nos représentants à cette assemblée. Et si cette assemblée est une assemblée des probes, d’intègres, de ceux qui veulent fonder le futur de la Tunisie sur le dialogue, la discussion et l’accord, alors ce sera la seule véritable institution que notre pays aura eue en cinquante ans. Et c’est pourquoi, il est plus que temps pour les membres de la société civile, de se
manifester et d’écrire une nouvelle page de l’histoire de la Tunisie. Femmes, hommes, jeunes, vieux, tous, nous avons notre place dans cette assemblée, à partir du moment où nous savons ce que nous voulons pour notre pays et que nous pouvons le défendre.
Code électoral : Les règles du jeu ?
Le scrutin est la manière de réaliser un vote et les modes de calcul destinés à
départager les candidats aux élections à l’aide de boules, de bulletins ou de
formulaires placés dans une urne ou dans une boîte virtuelle.
C’est l’ensemble des opérations qui constituent les élections, une méthode par laquelle une personne ou un groupe de personnes peuvent être désignées.
· Scrutin majoritaire
· Scrutin proportionnel
Un suffrage ?
Désigne la voix, le vote mais indique aussi qui a le droit de voter pour choisir ses représentants ou pour un référendum.
· Le suffrage universel suppose que tous les citoyens majeurs votent.
· Le suffrage direct suppose que l’électeur vote lui-même pour le candidat.
· Le suffrage indirect suppose que le candidat est élu par un collège électoral luimême désigné directement par les citoyens.
Des systèmes électoraux ?
Désignent un ensemble de caractéristiques regroupant les modes de scrutin,
d’attribution des sièges au Parlement et les éléments essentiels d’un régime.
Le choix du système électoral et surtout des modes de scrutin traduisent les objectifs politiques.
Le mode de scrutin proportionnel
Le découpage administratif des élections : le nombre de circonscriptions
Il y a au total 26 circonscriptions de votes découpées de la manière suivante :
2 circonscriptions pour le gouvernorat de Tunis, 2 circonscriptions pour le
gouvernorat de Sfax, et une circonscription de vote pour chacun des 22 autres gouvernorats des régions du Nord-est (Bizerte, Ariana, La Manouba, Ben Arous, Zaghouan, Nabeul), du Nord-ouest (Jendouba, Béjà, Le Kef, Siliana), du Centre-est (Sousse, Monastir, Mehdia), du Centre-ouest (Kairouan, Kasserine, Sidi Bouzid), du Sud-est (Gabès, Médnine, Tataouine), et du Sud-ouest (Gafsa, Tozeur, Kébili).
Déterminer le nombre de sièges réservés à chaque circonscription
Le nombre total de sièges de l’assemblée est de 260, chaque circonscription
disposera d’un représentant dans l’assemblée pour chaque 60000 habitants, (à titre d’exemple, une circonscription qui a 320 000 habitants disposera de 5 sièges), avec un minimum de quatre représentants (toute circonscription qui a moins de 240 000 habitants disposera automatiquement du minimum, à savoir, 4 sièges)
La constitution des listes
Nous allons voter pour des listes, ces listes sont caractérisées par une parité homme femme, et un positionnement alterné homme-femme, en prenant comme point de départ, la tête de liste. Les indépendants qui n’appartiennent à aucun parti politique ont le droit de
constituer des listes et de se présenter.
Le comptage des voix et l’attribution des sièges aux listes
Pour répartir les sièges entre les listes, il faut déterminer le quotient électoral = nombre de voix requis à l’obtention directe d’un siège, sur la base de voix ayant réellement participé au scrutin et du nombre de sièges réservés.
A titre d’exemple, si le nombre des voix ayant participé au scrutin est de 280.000, sachant qu'il y a cinq sièges pour cette circonscription, cela conduit à l'opération suivante : 280.000 à diviser par cinq, nous donne un siège pour 56.000 voix. Ainsi chaque liste reçoit un nombre de sièges égal au nombre de fois où elle recueille 56.000 voix, soit le quotient électoral.
· Si une liste 1 recueille, 120.000 voix, elle gagne deux sièges et un reliquat de 8.000 voix.
· Une liste 2 recueille 60.000 voix, elle gagne un siège et un reliquat de 4.000
voix.
· Une liste 3 obtient 40.000 voix.
· Elle n’aura aucun siège et un reliquat de 40.000 voix.
· Une liste 4 dispose de 35.000 voix.
· Elle n’aura aucun siège et un reliquat de 35.000 voix.
· Une liste 5 récolte 25.000 voix.
· Elle n’aura aucun siège et un reliquat de 25.000 voix.
Par conséquent, la liste 1 obtient directement deux sièges, la liste 2 obtient
directement 1 siège et il reste deux sièges à pourvoir en faisant intervenir le total des reliquats, car les autres listes n'ont pas atteint le quotient électoral nécessaire à l’obtention directe d’un siège qui est de 56.000 voix.
Pour distribuer les autres sièges, il y a recours aux reports les plus importants, les sièges seront attribués par priorité, aux listes qui disposent du plus grand reliquat, jusqu’à épuisement de ce dernier.
Ainsi, pour continuer notre exemple, les résultats seront comme suit :
· La liste 3 : 1 siège, sur la base du reliquat le plus important.
· La liste 4: 1 siège sur la base du deuxième reliquat le plus important
· La liste 5 : il ne reste plus de sièges à attribuer, elle ne disposera donc
d’aucun siège
Les auteurs
Rym Jaziri
Inscrite au Barreau de Tunis depuis 2004, Rym a une connaissance très approfondie de la loi tunisienne et française en matière de Droit des Sociétés.
Mohamed-Ali Razgallah